Sous le thème probabilités et statistiques au bridge, nous avons réuni Emile Borel (mathématicien) et Jean-René Vernes (philosophe, probabiliste et bridgeur) pour leurs apports fondamentaux à ce jeu de cartes et en particulier à travers le livre principal de chacun sur le bridge ( E.Borel , J.R.Vernes ).
Emile BOREL
Auteur, en 1940 en collaboration avec le joueur d'échecs André Chéron (1880-1952), de la Théorie mathématique du bridge à la portée de tous , le mathématicien aveyronnais (il est né à Saint-Affrique, ville dont il fût maire de 1929 à 1941) Félix Édouard Justin Emile Borel (1871-1956),
spécialiste essentiellement de la théorie des fonctions et des probabilités, nous présente dans ce livre une méthode et un grand nombre de résultats numériques pour utiliser la théorie des probabilités au bridge. Sa femme, Marguerite Appell, était la fille du mathématicien Paul Appell ; romancière sous le pseudonyme de Camille Marbo elle obtint le prix Fémina en 1913 et fonda avec son mari, alors qu'il était président de la Société mathématique de France, la Revue du mois, journal scientifique et littéraire.
Borel comprit très vite l'importance des probabilités qui pouvaient intervenir dans diverses disciplines (physique, chimie, astrophysique, biologie, économie,...), mais aussi dans le quotidien et dans divers jeux comme le bridge par exemple ...Il abandonna d'ailleurs en 1920 la chaire de théorie des fonctions à la Sorbonne
pour occuper celle des probabilités et physique mathématique; on peut le considérer comme un des fondateurs de la version moderne de cette discipline mathématique dont il fit une branche de la théorie de la mesure. Il fût aussi à l'origine de la mise en place de l'Institut Statistique Universitaire de Paris en 1922 et de l'Institut Henri Poincaré (à vocation probabilités et physique mathématique) en 1928 dont il fût le premier directeur (et ce jusqu'en 1948). Depuis 2009 c'est Cédric Villani , mathématicien français (né à Brive-la-Gaillarde en 1973) médaille Fields 2010, qui occupe le poste de
directeur de l'I.H.P.. Emile Borel a même assez largement participé à la création en 1939 du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), le plus grand organisme public français de recherche scientifique (dont le président depuis 2010 est le chimiste Alain Fuchs).
Dans l'un de ses livres sur les probabilités, il formule en 1909 sa célèbre expérience de pensée (méthode initiée par Galilée qui en faisait la clé de ses recherches scientifiques) sur le paradoxe du singe savant (ou théorème du singe infini): un singe qui tape indéfiniment sur un clavier (d'ordinateur de nos jours mais d'une machine à écrire à l'époque!) de manière aléatoire pourra 'presque sûrement' écrire un texte donné fini (comme Hamlet, la Bible ou l'annuaire téléphonique de l'Aveyron): la probabilité correspondante est bien sûr extrêmement faible (même si l'on considère que le singe tape pendant une durée de l'ordre de l'âge de l'univers) mais elle n'est 'pas nulle'! (les probabilistes préfèrent dire presque sûrement vrai
plutôt que presque partout vrai au sens de la mesure de Lebesgue , c'est-à-dire vrai sauf sur un ensemble dit négligeable, c'est-à-dire de mesure nulle au sens de Lebesgue - mathématicien dont Borel fût le directeur de thèse -)
D'après Borel, "la théorie des probabilités constitue un outil mathématique indispensable pour une forme d’accès intuitif
au réel (y compris le réel mathématique) en fournissant sur lui des renseignements de type statistique sur lequel fonder le raisonnement
et l’action".
LA LOI D'ATTRACTION
Dans le chapitre IV (Le jeu de la carte) les auteurs considèrent une main cachée avec une courte à carreau qui aura plus de chances que l'autre main cachée d'avoir une longue à pique et inversement...Ils introduisent ainsi la loi d'attraction. Si les deux mains cachées ont à elles deux, p cartes à pique, c à coeur, k à carreau et t à trèfle (p+c+k+t=26), nous dirons qu'une main est courte à carreau par exemple si son nombre de cartes à carreau est < k/2, l'autre main étant déclarée longue à carreau (nombre > k/2).
Ils en déduisent des propositions démontrées par le calcul des probabilités. "La longue et la courte s'attirent, la longue repousse la longue, la courte repousse la courte".
Ils ajoutent que "attraction et répulsion seront d'autant plus fortes que la répartition connue des carreaux aura été plus inégale".
Une répartition très anormale d'une couleur entre les 2 mains cachées augmente la probabilité de la répartition anormale d'une autre couleur entre les mains cachées.
"La loi d'attraction nous dira dans quel sens il convient de faire une impasse qui pourra être tentée dans les deux sens".
"C'est la main cachée la plus longue à l'atout qui coupera la première le plus souvent". LE PRINCIPE DU MOINDRE CHOIX
Emile Borel et André Chéron furent les premiers à signaler ce résultat dans leur livre, sans lui donner de nom mais simplement comme une application pratique de la formule de Bayes . Par la suite de nombreux auteurs ou bridgeurs (comme par exemple Jean-Marc Roudinesco, Alan Truscott ou Terence Reese) reprendrons et illustrerons ce qui deviendra le principe du moindre choix.
-- VERSION HISTORIQUE de BOREL-CHERON. --
Le chapitre (Note X - Applications pratiques de la formule de Bayes) qui traite le sujet est basé sur la main suivante: A 10 6 5 4 en Sud et R 9 3 2 en Nord. Suivons Borel dans sa démarche. Sud tire l'as et Ouest fournit un petit cependant que Est fournit le V (ou la D); Sud joue ensuite le X sur lequel Ouest met un petit. Comment continuer? Impasse ou R?
Suivons le texte de Borel. "Il faut faire l'impasse et je vais le démontrer par 4 solutions différentes. Au moment où le problème se pose, Sud connaît 2 coeurs chez Ouest, ce qui lui laisse 11 cartes inconnues, et 1 carte chez Est ce qui lui en laisse 12 inconnues. Ces 23 cartes comprennent l'honneur qu'il s'agit de prendre (V ou D). Ouest a donc 11 chances et Est 12 chances de l'avoir, mais n'oublions pas la probabilité des causes! Car, en fait, il y a 3 cas possibles, Est recevra 11 fois le V sec, 11 fois la D sèche et 12 fois DV secs!"
Le tableau explicatif de E.Borel
OUEST a:
EST a:
Nombres Proportionnels aux probabilités d'entrée en jeu des causes
Cas
D 8 7
V
11
1
V 8 7
D
11
2
8 7
D V
12
3
...(on cite seulement sa 'troisième solution') "Est a jeté le V sur l'as et il ne reste donc que 2 cas possibles (cas 1 et 3), Est a le V sec (11 fois a priori) et Est a DV secs (12 fois a priori). La probabilité qu'Est reçoive le V sec est 11/23 et, s'il l'a reçu, il est certain qu'il le jouera sur l'as: la probabilité composée pour que Est reçoive le V et le joue est donc 11/23 x 1 = 11/23.
La probabilité pour que Est reçoive DV secs est 12/23 et, s'il les a reçus, il ne jouera qu'une fois sur deux le V sur l'as (une fois sur deux il jouera la D sur l'as); la probabilité composée pour que Est reçoive DV secs et joue le V est donc 12/23 x 1/2 = 6/23.
Appliquons la formule de bayes pour calculer la probabilité a posteriori (celle qui tient compte de tout, de la probabilité d'entrée en jeu des causes et de la probabilité qu'Est joue comme il a joué s'il a reçu DV secs). Est aura V sec avec la probabilité:
(11/23)/(11/23 + 6/23) = 11/17
Et de même, Est aura DV secs avec la probabilité 6/17".
Il faut donc bien faire l'impasse à 11 contre 6.
-- VERSION MODERNE. --
Lorsqu'un joueur de flanc a le choix entre plusieurs cartes équivalentes à fournir, on supposera qu'il joue chacune d'entre elles avec la même fréquence (par exemple avec DV, il fournira 1 fois sur 2 la dame ou le valet); lorsqu'un joueur fournit une de ces cartes (librement), il y a environ deux chances contre une que la carte en question ne soit PAS accompagnée de l'autre carte équivalente.
On considère toujours que le déclarant joue le coup en SUD et on prendra comme exemple de base Axxx en SUD et RXxxx en NORD; SUD tire d'abord l'as et si EST fournit D ou V (cartes équivalentes) et OUEST un petit, il joue ensuite petit vers NORD et si OUEST fournit petit il fait l'impasse sur OUEST à l'honneur équivalent en passant le X.
Le principe du moindre choix:
dans le cas des petits doublets de type RD, DV, VX, le maniement résultant de ce principe est le suivant:
si au premier (ou au deuxième tour) un des éléments du doublet est apparu en EST,
au tour suivant on fait l'impasse au deuxième élément du doublet sur OUEST si, au moment où se pose le problème,
la situation est strictement la suivante: OUEST fournit à nouveau un petit et il ne reste plus en jeu QUE le deuxième élément
du doublet, éventuellement une carte supérieure mais JAMAIS une carte inférieure.
Cette règle s'applique à tous les doublets, aussi bien DV que X9 ou 87 ....
Pour convaincre et illustrer ce résultat, reprenons le cas où notre camp possède 9 cartes dans une certaine couleur où il nous manque DVxx; on sait (voir fréquences) que dans 50% des cas le partage adverse est 3-1 et 2-2 dans 40% (la première levée nous montrera s'il y a lieu que l'on se trouve dans les 10 % correspondants au partage 4-0). Dans le cas 2-2 il y a 6 doublets (C42) = 6), le doublet DV apparaît donc dans 40/6 = 6,6 % des cas, alors que la D ou le V sec représente 50/4 = 12,5 % des cas: l'impasse est environ à 2 contre 1.
QUELQUES PROBABILITES
Le livre de Borel-Chéron présente un grand nombre de tableaux de probabilités (134) et de formules simples qui peuvent être d'une grande utilité pour les bridgeurs. Citons quelques résultats.
-"Ayant 5 cartes à coeur en main, la probabilité a priori que le partenaire ait un fit d'au moins 3 cartes est de 54 %; avec 6 cartes dans une couleur, la probabilité
d'en avoir au moins 2 en face est de 75%; face à une couleur quatrième, la probabilité d'en avoir au moins 4 en face est de 33%".
- "La probabilité, a priori, de faire toutes les levées avec ARD5432 en main est de l'ordre de 86%; avec ARDX432 la même probabilité
est voisine de 89%".
- "Ayant un as en main, les probabilités d'en trouver en face (ou chez un adversaire) 0, 1, 2 ou 3 sont respectivement 28%, 46%, 22% et 3%".
- "La répartition a priori des As (ou d'ailleurs de 4 cartes quelconques) dans les quatre mains est 4-0-0-0 dans 1% des cas, 1-1-1-1 dans 10,5%, 2-2-0-0 dans 13,5 %, 3-1-0-0 dans 16,5% et 2-1-1-1 (le plus probable) dans 58,4%".
- "Ne connaissant que nos 13 cartes, avec une certaine couleur de 6 cartes, la probabilité de trouver, dans cette même couleur, une chicane ou un singleton (soit un 'accident' au sens de Borel) chez un adversaire est a priori (avant les enchères) de 45 %, et de 8% pour une chicane".
Il y aussi dans ce livre de nombreux exemples et tableaux de probabilités a posteriori, diverses études des variations des probabilités en cours de jeu, des attitudes à avoir en défense pour fournir ses cartes et ce en ayant toujours à l'esprit la formule de Bayes ... Donnons un exemple.
Le déclarant en sud joue à l'atout coeur avec au mort AV862, Sud part du 4, Ouest fournissant le 5, et passe le V du mort; en Est vous détenez X97, il vous faut jeter le X ou le 9 pour pousser le déclarant à partir de la D (pour forcer le R de votre partenaire et écraser votre 9 ou X, croyant que vous avez X9 secs). Si vous mettez petit, le déclarant jouera petit vers le mort en espérant la répartition Rx/X9x plutôt que Rxx/X9.
Il est enfin remarquable de noter que TOUS les calculs de ces probabilités ont été faits, à l'époque (1940-1955) à la 'machine à calculer avec retransmission mécanique du totalisateur au mécanisme d'inscription' sans utilisation ni de la formule de Stirling (pour approximer les factorielles - la fonction factorielle croit très vite, voir la page calcul de grandes factorielles en ligne sur Sayrac) ni des logarithmes ni de règles à calcul pour éviter des résultats trop approchés (dixit les auteurs).
Jean-René VERNES
Un quart de siècle après le livre de Borel, et certainement influencé par ce dernier, Jean-René Vernes a proposé une 'révolution statistique' de la stratégie au bridge que n'aurait sûrement pas désavouée mais plutôt largement encouragée Emile Borel, d'où notre rapprochement de ces deux auteurs.
Le bridge est d'abord (période des enchères) un jeu de communication (entre partenaires) qui utilise un langage très restreint de seulement 38 mots (35 enchères nT, nK, nC, nP, nSA pour n de 1 à 7, plus Passe, Contre et Surcontre), et en outre ces mots ne peuvent être prononcés n'importe comment: les 35 enchères ne peuvent se suivre que dans un ordre strictement croissant, le contre ne peut succéder qu'à une enchère adverse, le surcontre ne peut succéder qu'au contre et après quatre passes successifs la conversation est terminée. C'est la pauvreté de ce langage
qui nécessite un système d'enchères élaboré entre partenaires. La stratégie de celles-ci surtout en situation compétitive a beaucoup progressé grâce à Jean-René Vernes qui a réalisé une étude statistique portant sur les dix championnats de monde de 1953 à 1963, soit sur
un ensemble de près de 2500 donnes avec environ 5000 séquences d'enchères associées. Jean-René Vernes (1914-2012) initialement professeur de philosophie au lycée de Sarrebruck, soutient une thèse de logique en Sorbonne, publie quelque ouvrages sur la métaphysique puis sur le bridge, dont un en particulier qui va bouleverser la conception de ce jeu de cartes. C'est donc après une énorme compilation et analyse de très nombreuses de donnes qu'il a pu déduire une puissante interprétation qui l'a conduit à énoncer des principes
généraux de stratégie tout à fait nouveaux.
Dans son livre Bridge moderne de la défense, Jean-René Vernes (1914-2012) énonce en 1966 le grand 'théorème'(*) du bridge: la LOI DES LEVEES TOTALES (LoTT -Law of Total Tricks- ou The Law pour les anglo-saxons), loi statistique issue de l'analyse d'un grand nombre de donnes, dont il tire quelques
corollaires, comme la règle de 7 à 12, la règle de 7 et la règle du Delta.
Loi des levées totales: le nombre de levées totales d'une donne est approximativement égal au total du nombre d'atouts détenus par les deux camps dans leur couleur respective.
Il convient de préciser que l'emploi de cette règle nécessite deux conditions:
-Les forces en honneurs ne doivent pas être réparties trop inégalement entre les deux camps, de préférence entre 17 et 23 points H, à la rigueur entre 15 et 25.
-La vulnérabilité doit être égale ou favorable; en cas de vulnérabilité défavorable il faut que la force totale du camp soit égale (ou presque égale) à celle du camp adverse.
Si, par exemple, le camp Nord-Sud a 11 cartes à pique et le camp Est-Ouest, 9 cartes à coeur, le nombre de levées totales sur la donne sera de 11 + 9 = 20. Ce nombre 20 est un invariant sur la donne, indépendant des positions relatives des cartes dans un camp donné; un R peut être en Est ou en Ouest et l'impasse correspondante peut rater (1 pli de moins pour NS à pique mais un de plus pour EO à coeur) ou réussir (+1 pour NS et -1 pour EO) sans rien changer au total 20 des levées (10+10 ou 11+9 fait toujours 20).
Corrections à la loi des levées totales: le nombre N de levées totales est souvent affecté par les trois facteurs annexes suivants.
1) Existence d'un double fit (le plus important de ces facteurs annexes): chaque camp possède au moins 8 cartes dans au moins deux couleurs, N est le plus souvent supérieur d'une unité au nombre fourni par la formule générale.
2) Possession des honneurs d'atout: lorsque chaque camp possède tous les honneurs de sa couleur d'atout, N est fréquemment supérieur au nombre indiqué par la formule, et inversement inférieur lorsque les honneurs d'atout sont possédés par les adversaires.
3) Répartition des couleurs restantes: des distributions irrégulières des couleurs restantes (5-1 et pas 3-3, 4-1 et pas 3-2 ..) rendent N légèrement supérieur et des distributions régulières plutôt inférieur.
Levées totales à sans-atout. "Il n'est généralement intéressant de surenchérir contre une déclaration adverse à sans-atout qu'avec un singleton ou une chicane".
Considérons le cas où le camp adverse s'est arrêté à 1 sans-atout et dispose donc nécessairement d'au moins un fit de 7 cartes. Si notre camp possède un fit de N (≥7) cartes, le tableau suivant de J.R.Vernes nous fournit le nombre de levées totales suivant le type de courte dans notre camp.
Levées totales quand l'adversaire est supposé jouer à SA avec 7 levées potentielles
Nombre d'atouts N de notre camp
1 chicane ou 2 singletons dans notre camp
1 singleton dans notre camp
1 doubleton (ou 1 courte de 3 cartes) dans notre camp
10
18
17
16
Levées totales correspondant au nombre N d'atouts
9
17
16
15
8
16
15
14
7
15
14
13
La règle statistique qu'en déduit Jean-René Vernes (et qui aurait été chère à Emile Borel) est la règle de 7 à 12:
La règle de 7 à 12:
la sécurité distributionnelle permet de demander autant de levées que l'on possède d'atouts dans son camp entre son jeu et celui de son partenaire.
Avec 9 atouts on peut enchérir (en sécurité distributionnelle) jusqu'au palier de 3, avec 10 atouts jusqu'au palier de 4 ...
La précision de cette loi statistique est telle que l'écart moyen est de 0,93 levée; comme l'écart moyen entre deux tables dû au jeu de la carte des uns et des autres (choix plus ou moins heureux ...) est de 0,52 levée, l'erreur additionnelle due à la formule des levées totales n'est que de 0,40 levée.
Le soutien distributionnel dans les situations compétitives utilisera largement cette règle.
Dès que l'on possède au moins autant d'atouts que le complément à 13 du nombre de levées espérées par l'adversaire (on a 4 atouts et les adversaires demandent 3 piques c'est-à-dire
espérent faire 9 levées), on peut envisager un contre punitif.
La règle de 7: pour faire un contre punitif, un joueur doit posséder un nombre d'atouts tel qu'en ajoutant ce nombre à celui des trics demandés par l'adversaire on obtienne au moins 7 ; si ce nombre est exactement 7, le camp qui contre doit posséder au moins environ 19-20 points H; dans les autres cas on peut admettre environ 3 points H en moins pour un atout en plus (16-17 H quand total atouts + trics est égal à 8, 13-14 H quand il est égal à 9).
Cette règle a été vérifiée sur des centaines de donnes par l'équipe de Jean-René Vernes et elle apparaît d'une très bonne précision.
Dans le cadre des interventions à saut sur une couleur adverse, Vernes appelle DELTA la différence entre le nombre de cartes que l'on détient dans sa propre couleur et celui dans la couleur adverse (si l'adversaire de droite ouvre d'1 coeur et si vous intervenez à 2 piques avec 6 cartes et deux à coeur, on dira que votre main possède un delta 4 et on notera Δ=4).
La connaissance du delta total de son camp donnera facilement le nombre N de levées totales de la donne: si l'intervenant possède un Δ1 et son partenaire un Δ2 on obtient immédiatement:
N = 13 + Δ1 + Δ2
La règle du DELTA:
pour une intervention à saut au niveau de n tricks (n = 2, 3, ...), il faut:
- un delta = n + 3
- une main qui justifie une intervention au palier correspondant
- le plus souvent un singleton ou une chicane dans la couleur adverse
Ainsi pour une intervention à 2 piques sur 1 coeur il faudra un delta 5 et de 12 à 16 DH (par exemple DVxxxx, x, Ax, Dxxxx), un delta 6 pour intervenir à 3 piques...
La formule de Bayes
Le mathématicien britannique Thomas BAYES (1702-1761) n'a écrit aucun article scientifique et son 'théorème de Bayes' ne fut publié qu'à titre posthume en 1763, et reste une loi importante en probabilités.
Si l'on note P(A|B) la probabilité de A sachant B ou, suivant Borel, la probabilité que la cause B, dont l'entrée en jeu est admise
comme certaine, produise A, la formule de Bayes s'exprime par:
P(A|B) = P(B|A)P(A)/ P(B)
Pour établir ce résultat on part de la définition des probabilités conditionnelles (P(A∩B) définissant la probabilité que A et B aient tous les deux lieu):
P(A|B)P(B) = P(A∩B) = P(B|A)P(A)
SOMMAIRE du livre Théorie mathématique du bridge à la portée de tous (2e édition, Gauthier-Villars 1955, deuxième édition), Emile Borel et André Chéron.
I - Le battage des cartes.
- Position du problème pratique.
- Prestidigitateurs. Battages trop réguliers.
- Définition de l'opération élémentaire de battage.
- Influence du battage sur la répartition entre 4 joueurs.
- Effets de l'opération élémentaire.
- Rupture des séquences.
- Vérification expérimentale.
- Conséquences d'un battage imparfait.
- Cas où les joueurs ignorent le coup précédent.
- Étude des séquences unicolores.
II - La distribution des cartes après la donne.
- But de ce chapitre.
- Notations. Combinaisons et pourcentages.
- Nombre des distributions, des mains et des côtés.
- Sens précis du nombre des distributions.
- Permutations.
- Les mains à priori.
- Probabilités à priori des mains dans la donne.
- Remarques sur les décimales.
- Les côtés à priori.
- Une couleur dans une main ou un côté. Bicolore dans une main un côté. Les distributions à priori entre 4 mains. Probabilités des donnes.
- Démonstration de la méthode des coefficients.
- L'accident à priori.
- Distribution à priori des hautes cartes.
III - La phase des déclarations.
- But de ce chapitre.
- Les mains à posteriori.
- Les côtés considérés comme paires de mains.
- Répartition d'un résidu entre 3 mains cachées.
- Probabilité d'une couleur courte (0, 1 ou 2) lorsque je vois mes 3 cartes.
- L'espoir dans le mort.
- L'espoir dans le mort avec des mains bicolores ou tricolores. Les tours.
- Probabilités des honneurs et d'une main nulle.
- Les levées de longueur.
- Valeur défensive des honneurs.
- De quelques entames.
IV - Le jeu de la carte.
- Remarque fondamentale.
- Les mains à posteriori.
- Répartition d'un résidu entre les 2 mains cachées.
- Cas d'une carte intéressante.
- Répartition de 2 résidus entre 2 mains cachées (probabilités globales).
- Répartition de 2 résidus (probabilités partielles).
- Remarques générales sur la probabilité à posteriori.
- La loi d'attraction : son importance.
- Répartition de 3 résidus entre 2 mains cachées.
- L'accident dans 1 ou 2 mains cachées.
V - Les règles de la marque et la meilleure ligne de jeu.
- Remarques générales.
- Valeur d'une levée au point de vue de la marque.
- La meilleure ligne de jeu. Théorie et applications.
- Étude générale d'un cas fréquent. Choix entre le risque et la sécurité.
- Résumé
- Tableaux de la marque du contrat et du plafond
- Valeur des manches au plafond et au contrat
- Application au jeu du coup
- Conclusions sur la meilleure ligne de jeu.
- D'un cas pratique fréquent au contrat. Choix du demandeur.
- D'un cas pratique fréquent au contrat. Choix du défenseur.
- Applications à quelques problèmes de déclaration au contrat.
NOTES
I - Compléments théoriques sur le battage des cartes.
- Sur un problème continu analogue au battage des cartes.
- Retour au battage réel des cartes.
- Étude plus précise de l'indépendance des probabilités.
- Rupture des séquences.
- Séquences reconstituées.
- Remarques sur une opération élémentaire.
- Recherche théorique de l'opération la plus simple.
- Étude des séquences unicolores.
II - Dénombrement des permutations d'une donne.
- Nombre total des permutations d'une donne.
- Donnes sans main de plus de 4 (5) cartes d'une même couleur.
- Tableaux essentiellement différents.
- Tableaux réciproques.
III - Sur les probabilités virtuelles.
- Sur certains problèmes de répartition et les probabilités virtuelles.
- Sur une interprétation des probabilités virtuelles.
- Application aux probabilités du bridge.
IV - Remarques sur le jeu de la carte.
- Sur la théorie générale des impasses.
- Le rapport et le prix d'une impasse.
- Les 3 catégories de levées.
- Exemples.
V - Sur les équipes de forces inégales.
- Simplification du problème.
- Étude de deux termes de l'espérance mathématique.
- Variations de l'espérance mathématique au cours des enchères.
VI - Sur la variation des probabilités au cours du jeu.
- Sur la variation des probabilités au cours du jeu.
- Étude détaillée d'un problème assez général.
VII - Compléments à la méthode des coefficients.
- Définition des coefficients.
- But de la Note VII. Les cinq problèmes sur la répartition des 4 couleurs entre les mains cachées.
VIII - Deux erreurs de raisonnement à éviter.
- Sur quelques erreurs à éviter.
- La première erreur.
- La deuxième erreur (jeu de Paul).
- Transposition dans le domaine du bridge.
- La formule de Bayes.
IX - Sur un problème d'impasse.
X - Applications pratiques de la formule de Bayes.
SOMMAIRE du livre Bridge moderne de la défense (Emile-Paul 1966), Jean-René Vernes.
I - Théorie générale des surenchères défensives.
- L'évaluation des mains.
- Les enchères compétitives et la loi des levées totales.
II - Les interventions du joueur n° 2 après une ouverture d'un tric à la couleur.
- Les inteventions à la couleur au iveau d'un tric.
- Les interventions d'un tric sans saut.
- Les interceptions à saut.
- Le contre d'appel.
- Le cue-bid.
- Les interventions à sans-atout.
- Passe-parole et interventions différées.
III - Les problèmes particuliers de la défense.
- Les interventions du joueur n°4.
- Les interventions sur un sans-atout.
- Les intervenions contre les ouvertures de barrage à 3, 4, 5 trics ...
IV - Les règles pratiques des enchères compétitives.
- Les enchères compétitives et le soutien distributionnel.
- Le contre de pénalité
(*)Seul véritable théorème du bridge si l'on exclue le 'théorème stratégique' de Meckstroth-Rodwell: si vous hésitez entre un certain contrat et 3 SA, choisissez toujours 3 SA!